Qu'est-ce qui cause le bégaiement ? (Buchel/Sommer 2004)

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PlosBiology - Février 2004

Qu'est-ce qui cause le bégaiement ?
Christian Büchel et Martin Sommer

Le bégaiement, avec ses perturbations caractéristiques de la fluence verbale, est connu depuis des siècles : les descriptions les plus anciennes datent probablement du Moïse Biblique, de la "lenteur de son discours et de sa langue" et son comportement d'évitement lié (Exode 4, 10–13). Le bégaiement apparaît dans toutes les cultures et tous les groupes ethniques (Andrews et coll. 1983 ; Zimmermann et coll. 1983), bien que la prévalence puisse différer. Tant que la plupart des étapes de notre façon de produire le langage normalement restent un mystère, des troubles tels que le bégaiement sont encore pauvrement compris. Cependant, les approches génétiques et neurobiologiques nous donnent aujourd'hui des indices sur les causes et de meilleurs traitements.

Qu'est-ce que le bégaiement ?
Le bégaiement est une interruption dans la fluence de l'expression verbale caractérisée par des prolongations, répétitions, audibles ou silencieuses, des sons ou syllabes (Fig.1). Ils ne sont pas facilement contrôlables et peuvent s'accompagner d'autres mouvements et par d'autres émotions de nature négative telles que la peur, la gène, ou l'agacement (Wingate 1964). A strictement parler, le bégaiement est un symptôme, pas une maladie, mais le terme bégaiement se réfère habituellement à la fois au trouble et au symptôme. Le bégaiement développemental évolue avant la puberté, en général entre 2 et 5 ans, sans dommage apparent au cerveau ou autre cause connue (“idiopathique”). Il est important de distinguer le bégaiement développemental persistant (BDP), qui nous intéresse ici, et le bégaiement acquis. Le bégaiement acquis ou bégaiement neurogène (ou bégaiement neurologique NdT) apparaît après une blessure définissable au cerveau, par exemple attaque, hémorragie intracérébrale, ou trauma à la tête. C'est un phénomène rare qui a été observé après des lésions dans plusieurs zones du cerveau (Grant et coll. 1999; Ciabarra et coll. 2000). La présentation clinique du BDP diffère de celle du bégaiement acquis en cela que le premier est surtout important en début de phrase ou de mot, dans les mots longs ou importants, ou des tournures complexes syntaxiquement (Karniol 1995; Natke et coll. 2002)

Figure 1. Ondes de parole et spectrographies de sons d'un homme prononçant “Plos Biology”La colonne de gauche montre des ondes de paroles (amplitude en fonction du temps); celle de droite montre une disposition temps-fréquence en utilisant une décomposition de ces données. Sur la rangée du haut, le locuteur est fluent, en bas, les répétitions typiques du bégaiement apparaissent sur le “B” de “Biology.” Quatre répétitions peuvent clairement être identifiées (flèches) dans le spectrogramme (en bas à droite).
Figure 2. Deux équipements différents pour empêcher le bégaiement
A gauche, un appareil conçu par Gardner en 1899 pour ajouter superficiellement du poids sur la langue (N° brevet aux E.U. 625,879). A droite un appareil de parole plus complexe par Peate en 1912 (N° brevet E.U. 1,030,964).


et l'anxiété associée et les symptômes secondaires sont plus prononcés (Ringo et Dietrich 1995). De plus, lors de lectures répétées, la fréquence du bégaiement tend à décliner (adaptation) et à apparaître sur les mêmes syllabes qu'avant (constance). Néanmoins, la distinction entre les deux types de bégaiement n'est pas stricte. Chez les enfants avec un dommage périnatal ou autre, le bégaiement est plus fréquent que chez des contrôles du même âge, et les deux types de bégaiement peuvent se superposer (Andrews et coll. 1983).

Qui est touché ?
Le bégaiement persistant est un trouble très fréquent, avec environ 1% de la population souffrant de cette affection. On estime que 3 millions de personnes aux États-Unis et 55 millions de personnes dans le monde bégaient. La fréquence est similaire dans toutes les classes sociales. Dans la plupart des cas, le bégaiement altère sévèrement la communication avec des conséquences socioéconomiques désastreuses. Cependant, il y aussi beaucoup de personnes bègues qui malgré leur trouble, sont devenus célèbres. Par exemple, Winston Churchill devait répéter tous ses discours publics jusqu'à la perfection et s'exerçait même aux questions possibles et critiques pour éviter le bégaiement. Charles Darwin a également bégayé ; de façon intéressante, son grand-père Erasmus Darwin a souffert de la même condition, mettant en évidence le fait que le bégaiement se retrouve dans une même famille et a probablement une base génétique. L'incidence du BDP est d'environ 5%, et son taux de rémission est d'environ 80%, résultant en une prévalence d'environ 1% de la population adulte. Comme la rémission est considérablement plus fréquente chez les garçons que chez les filles, le ratio garçon-fille augmente durant l'enfance et l'adolescence pour atteindre 3 ou 4 hommes pour une femme à l'âge adulte. Il est difficile de dire dans quelle mesure cette rémission est spontanée ou induite par la thérapie. De même, il n'y a aucune façon valable de prédire quel enfant va se rétablir (Yairi et Ambrose 1999). La présence de membres de la famille affectés suggère une composante héréditaire. Le taux de concordance est d'environ 70% pour des jumeaux mono zygotes (Andrews et coll. 1983; Felsenfeld et coll. 2000), environ 30% pour les jumeaux dizygotes (Andrews et coll. 1983; Felsenfeld et coll. 2000), et 18% pour des enfants d'un même sexe d'un même couple (Andrews et coll. 1983). Étant donné le fort taux de rémission, il se pourrait bien que le groupe d'anomalies observés chez les adultes reflète une rémission altérée plutôt que les causes du bégaiement (Andrews et coll. 1983).


Théories changeantes
A travers les siècles, une variété de théories sur l'origine du bégaiement et les traitements correspondants ont été proposées. Dans la Grèce antique, les théories faisaient allusion à la sécheresse de la langue. Au 19e siècle, on pensait que des anomalies dans l'appareil de parole étaient la cause du bégaiement. Ainsi, les traitements étaient basés sur la chirurgie "plastique" étendue, menant souvent à des mutilations et à des infirmités supplémentaires. D'autres options de traitement étaient des poids pour la langue ou des prothèses buccales (Katz 1977) (Fig. 2). Au 20e siècle, on pensait que le bégaiement était essentiellement un trouble psychogène. En conséquence, les approches psychanalytiques et une thérapie comportementale étaient appliquées pour résoudre de possibles conflits névrotiques (Plankers 1999). Cependant, des études des traits de personnalités et des interactions enfants-parents n'ont pas détecté de schémas psychologiques significativement associés au bégaiement (Andrews et coll. 1983). D'autres théories en regard du bégaiement en tant que comportement acquis, résultant de réactions désavantageuses externes, généralement parentales, à des disfluences enfantines normales (Johnson 1955). Alors que ce modèle n'a pas réussi à expliquer les symptômes centraux du bégaiement (Zimmermann et coll. 1983), il peut très bien expliquer les symptômes secondaires (Andrews et coll. 1983), et que l'intervention parentale précoce puisse prévenir la persistance dans la vie adulte (Onslow et coll. 2001). La gravité du bégaiement est clairement modulée par l'excitation, la nervosité et d'autres facteurs (Andrews et coll. 1983). Cela a mené à un modèle bi-facteurs du BDP. On pense que le premier facteur cause le bégaiement et est plus probablement une anomalie structurelle ou fonctionnelle du système nerveux central (SNC), tandis que le second facteur renforce le premier, surtout à travers le comportement d'évitement. Cependant, on doit être prudent en appelant ce dernier facteur “psychogène” ou “psychologique,” car la neuroscience a montré que l'apprentissage n'est pas simplement "psychogène" mais conduit à des changement mesurable dans le cerveau (Kandel et O'Dell 1992). Dans certains cas, l'excitation améliore le bégaiement au lieu de l'aggraver. En conséquence, certains bègues célèbres ont traité leur bégaiement en s'exposant eux-mêmes. Pour anecdote, l'acteur américain Bruce Willis, qui a commencé à bégayer à l'âge de 8 ans, à rejoint un club de théâtre au lycée et son bégaiement a disparu en face du public.


Le bégaiement est-il un trouble sensoriel, moteur, ou cognitif ?
Les sujets bègues en tant que groupe diffèrent de groupes de contrôles fluents en montrant, en moyenne, des scores légèrement plus faibles en intelligence dans des tâches verbales et non-verbales et par des retards dans le développement du langage (Andrews et coll. 1983; Paden et coll. 1999). Cependant, les scores d'intelligence plus faibles doivent être interprétées (1) avec prudence, puisque les bègues montrent un désavantage scolaire de plusieurs mois (Andrews et coll. 1983). Les symptômes associés comprennent des retards dans des tâches demandant une réponse vocale (Peters et coll. 1989) et dans des tâches chronométrées bimanuelles complexes tels que l'insertion d'une ficelle dans le chas d'une aiguille (Vaughn et Webster 1989), tandis que plusieurs autres études sur les temps de réaction sensorimoteur ont donné des résultats inconsistants (Andrews et coll. 1983). Des altérations du feedback auditif (par exemple, feedback auditif retardé, feedback a fréquence altéré), différentes formes d'autres stimulations auditives (par ex. la lecture chorale), et l'altération du rythme de parole (par ex. la parole hachée par syllabe) fournit une réduction prompte et marquée de la fréquence du bégaiement, ce qui a éveillé les soupçons sur un traitement auditif ou un rythmeur interne altéré chez les personnes bègues (Lee 1951; Brady et Berson 1975 ; Hall et Jerger 1978; Salmelin et coll. 1998). D'autres équipes ont aussi rapportés des démarrages retardés ou désordonnés des schémas d'articulations complexe chez les sujets bègues (Caruso et coll. 1988; van Lieshout et coll. 1993). La supposition que le bégaiement soit une forme de dystonie -contractions involontaires de muscles produites par le SNC— spécifique à la production de langage (Kiziltan et Akalin 1996) n'était pas soutenue par une étude sur l'excitabilité du cortex moteur (Sommer et coll. 2003). La neurobiochimie, cependant, peut relier le bégaiement à des troubles d'un réseau de structures impliquées dans le contrôle du mouvement, les noyaux gris centraux. Une augmentation du neurotransmetteur dopamine a été associé aux troubles du mouvement tels que le syndrome de la Tourette (Comings et coll. 1996; Abwender et coll. 1998), qui est un trouble neurologique caractérisé par des mouvements involontaires répétés du corps et des sons vocaux (tics vocaux et moteurs). En conséquence, comme le syndrome de la Tourette, le bégaiement s'améliore avec des médications antidopaminergiques, par ex. les neuroleptiques tels que l'halopéridol, la risperidone, et l'olanzapine (Brady 1991; Lavid et coll. 1999; Maguire et coll. 2000), et des rapports anecdotiques suggèrent qu'il apparaît ou est accentué sous traitement dopaminergique (Koller 1983; Anderson et coll. 1999 ; Shahed et Jankovic 2001). Partant de là, on a supposé que le système neurotransmetteur dopaminergique contribue au bégaiement (Wu et coll. 1995). Bien que les antagonistes de dopamine aient un effet positif sur le bégaiement, ils ont tous des effets secondaires qui les ont empêchés d'être en première ligne pour le traitement du bégaiement.

Tirer des leçons de l'imagerie cérébrale
En considérant les rapports sur le bégaiement acquis après un traumatisme au cerveau (Grant et coll. 1999; Ciabarra et coll. 2000), on pourrait penser qu'une analyse de la lésion (c-à-d se demander où toutes les lésions qui mènent au bégaiement se chevauchent) pourrait aider à trouver l'endroit de l'anomalie liée au bégaiement. Malheureusement, les lésions amenant un bégaiement sont déployées et ne semblent suivre aucun modèle de chevauchement. Même le contraire a été observé, une attaque thalamique après laquelle le bégaiement fût "guéri" chez un patient (Muroi et coll. 1999). Chez les locuteurs fluents, l'hémisphère gauche dominant pour le langage est plus actif durant la parole et les tâches de langage. Cependant, des études antérieures en EEG sur la latéralisation ont déjà suggéré une dominance hémisphérique anormale (Moore et Haynes 1980) chez les personnes bègues. Avec l'avènement d'autres techniques d'imagerie non-invasive du cerveau comme la tomographie par émission de positron (TEP) et l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), il est devenu possible de visualiser l'activité du cerveau des personnes bègues et de comparer ces schémas à des contrôles fluents. Suivant des théories importantes qui ont relié le bégaiement à un déséquilibre de l'asymétrie hémisphérique (Travis 1978; Moore et Haynes 1980), une étude TEP importante (Fox et coll. 1996) a rapporté une activation accrue dans l'hémisphère droit lors d'une tâche de langage chez les bègues développementaux. Une autre étude TEP (Braun et coll. 1997) a confirmé ces résultats, mais ont ajouté un détail important à l'étude précédente : Braun et ses collègues ont découvert que l'activité dans l'hémisphère était plus forte pendant la production de parole bégayée, tandis que l'activation de l'hémisphère droit était plus corrélée à la parole fluente. Ainsi, les auteurs ont conclu que la dysfonction première est localisée dans l'hémisphère gauche et que l'hyperactivation à droite ne peut pas être la cause du bégaiement, mais plutôt un processus compensatoire. Un processus compensatoire a été observé après une attaque ou une aphasie, où un hémisphère droit intact peut au moins compenser pour une perte de fonction



Figure 3. Cohérence diminué des fibres
Des cohérences de fibre diminuées, observées par DTI, chez les personnes bègues, comparées à un groupe de locuteurs fluents contrôles. Un point rouge indique la différence maximum dans les coupes coronale (en haut à gauche), axiale (en haut à droite), et sagittale (en bas).



(Weiller et coll. 1995). L'hyperactivation de l'hémisphère droit pendant le discours fluide a été plus récemment confirmé par IRMf (Neumann et coll. 2003). Le TEP et l'IRMf ont des hautes résolutions spatiales, mais parce qu'ils indiquent seulement l'activité cérébrale à travers le flux sanguin, leur résolution temporelle est plutôt limitée . La magnétoencéphalographie (MEG) est une méthode de choix pour examiner avec un grain fin la séquence temporelle de l'activité du cerveau. Par conséquent, le MEG était utilisé pour examiner les personnes bègues et les contrôles fluents lisant des mots simples (Salmelin et coll. 2000). De façon importante, on rapportait que les personnes bègues lisaient les mots isolés avec fluence. Néanmoins, les données ont montrés une différence bien nette entre les personnes bègues et les contrôles. Tandis que les contrôles fluents activaient les zones frontales gauches impliquées dans la planification du langage avant les zones centrales impliquées dans l'exécution de la parle, ce schéma était absent, même inversé, chez les personnes bègues. C'était la première étude à montrer directement une corrélation neuronale d'un supposé trouble de la synchronisation de la parole chez les personnes bègues (Van Riper 1982). Ainsi, les études par neuroimagerie fonctionnelle ont révélé deux faits importants :
(i) chez les personnes bègues, l'hémisphère droit semble hyperactif, et
(ii) un problème de synchronisation semble exister entre le cortex frontal gauche et le cortex central gauche.
La dernière observation correspond aussi aux dernières observations, qui ont montré que les personnes bègues ont des légères anomalies dans les tâches de coordination complexes, suggérant que le problème sous-jacent est localisé autour des zones moteurs et prémoteurs associées. Y-a-t-il des anomalies structurelles en parallèle aux anomalies fonctionnelles ? La première étude anatomique pour examiner cette question a utilisé des scanners MR haute-résolution et a trouvé des anomalies des zones de parole–langage (zones de Broca et Wernicke) (Foundas et coll. 2001). De plus, ces chercheurs ont rapportés des anomalies dans le schéma de gyrification. La gyrification est une procédure développementale complexe, et des anomalies de ce traitement sont un indicateur d'un trouble développemental. Une autre étude récente a examiné l'hypothèse qu'une connectivité corticale altérée pourrait être à la base de perturbations entre les régions frontales et centrales observées au MEG (Figure 3). En utilisant une nouvelle technique IRM, l'imagerie par tenseur de diffusion (DTI), qui permet l'évaluation de l'ultrastructure de la matière blanche, les examinateurs ont vu des faisceaux de fibres de matière blanche dont la cohérence était réduite dans l'opercule Rolandique (Sommer et coll. 2002). Cette structure est adjacente à la représentation moteur de la langue, du larynx et du pharynx (Martin et coll. 2001) et le faisceau arqué inférieur liant les zones du langage temporales et frontales, qui ensemble forment un système de langage temporofrontal impliqué dans la perception et la production des mots (Price et coll. 1996). Il est ainsi concevable que la transmission de signal perturbée à travers les fibres passant par l'opercule rolandique gauche affaiblit la rapide intégration sensorimoteur nécessaire à la production de parole fluente. Cette théorie explique aussi pourquoi le modèle normal d'activation temporel entre les cortex moteur et prémoteur est perturbé (Salmelin et coll. 2000) et pourquoi, comme conséquence, les zones du langage de l'hémisphère droit essayent de compenser pour ce défaut (Fox et coll. 1996). Ces nouvelles données fournissent aussi une théorie pour expliquer le mécanisme commun d'induction de fluence comme avec la lecture chorale, le chant, et la lecture en métronome qui réduisent le bégaiement instantanément. Toutes ces procédures impliquent un signal externe (les autres lecteurs, la musique, le métronome). Tous ces signaux externes vont alimenter le “système de production de parole” à travers le cortex auditif. Il est ainsi possible que ce déclic de signal atteint les zones centrales productrices de la parole en faisant échouer la déconnexion frontocentrale, et soit capable de resynchroniser l'activité frontocentrale décorrélée. En des termes plus simples, ces signaux externes peuvent être vus comme un "pacemaker" externe.

Directions futures pour la recherche
Il y a de nombreuses questions en suspens à propos du bégaiement. Si les changements structurels dans le cerveau causent le bégaiement, la question-clé est de savoir quand cette lésion apparaît. Bien que les symptômes soient quelque peu différents, il serait intéressant de découvrir en quoi le bégaiement transitoire (qui apparaît chez 3%–5% des enfants) est lié au bégaiement persistant. Il est possible que tous les enfants qui montrent des signes de bégaiement développent une anomalie structurelle pendant le développement, mais c'est transitoire chez ceux qui deviennent des locuteurs fluents. Si c'est le cas, il est encore plus crucial que la thérapie démarre aussi tôt que possible pour avoir plus d'impact. Cette question peut aujourd'hui trouver une réponse avec la méthodologie actuelle, c'est-à-dire l'imagerie non-invasive utilisant l'IRM.
Étant donné que les garçons ont une probabilité moins forte de se remettre du bégaiement que les filles, il est tentant de supposer que toutes les personnes bègues ont une légère anomalie, mais seulement ceux qui peuvent utiliser l'hémisphère droit pour le langage peuvent devenir des locuteurs fluents. La latéralisation du langage est moins prononcée chez les femmes (McGlone, 1980) et pourrait par conséquent être liée au fait que les femmes montrent un taux global plus faible de bégaiement. Là encore, une étude développementale comparant des enfants qui bégaient à des contrôles fluents et, plus important encore, des études longitudinales sur ces enfants, devraient permettre de répondre à ces questions. Il est improbable que le bégaiement soit hérité d'une manière simple. Actuellement, un modèle multifactoriel pour la transmission génétique est plus probable.
De plus, on ne sait pas si un certain génotype mène au bégaiement ou si il représente seulement un facteur de risque et que d'autres facteurs environnementaux soient nécessaires pour que le bégaiement se développe. A nouveau, cette question devrait trouver une réponse dans un futur proche, puisque le National Institutes of Health vient récemment de terminer la phase de collecte de données d'un large échantillon pour le bégaiement, pour des analyses de liens génétiques.


Abréviations : SNC, système nerveux central; DTI, imagerie par tenseur de diffusion ; IRMf imagerie par résonance magnétique fonctionnelle ; MEG, magnétoencéphalographie; IRM, imagerie par résonance magnétique; BDP, bégaiement développemental persistant ; TEP Tomographie par émission de positron



Commentaires

Anonyme a dit…
Un grand merci Olivier pour cet excellent article que je trouve d'une clarté absolue et qui reste cependant scientifique.
Est-ce ta traduction ?
Dans ce cas bravo !

Daniel P.
Unknown a dit…
Olivier :

Merci pour cette traduction. Je relisais récemment cet article pour écrire un cours, en me demandant pourquoi diantre il n'avait pas encore été traduit, alors qu'il était très simple...je vais donc le signaler aux étudiants ; merci pour eux.

Martin Sommer parle parfaitement le français, il a été étudiant à Toulouse pendant ses études de médecine, avec le programme Erasmus.

Il vient de publier un autre article.

La "cause" du bégaiement avance...

Mais ce n'est pas parce que l'on comprend ou connait les causes que l'on trouve la solution...et certaines solutions peuvent être très efficaces sans que l'on comprenne encore bien comment cela a fonctionné.
On a pris de l'aspirine pendant cent ans avant de comprendre qu'elle agissait sur les prostaglandines..

Marie-Claude Monfrais-Pfauwadel
O a dit…
Oui Daniel, c'est bien ma traduction. Par conséquent si erreurs il y a, elles me sont imputables...

Merci Dr,
Avec "Verbal Bottleneck", je me doutais que cet article pourrait être utile.
Bon je vais mettre quand même une mise en garde au cas où, de se référer quand même au doc original.

Vos réactions me font plaisir.
Anonyme a dit…
Certes comprendre où connaître les causes ne suffit pas, mais cela peut cependant aider à mieux accepter, ... et accepter c'est déjà avancer un peu ;)

Daniel P.
Anonyme a dit…
"Pour avoir un trouble psychologique il suffit de vouloir absolument l'éviter". Il est étonnant que cet aphorisme de l'école de Palo Alto (Watzlawick, Erickson, Bateson...) qui propose une hypothèse (et une thérapie) géniale et originale ne soit jamais pris en compte dans les théories psychologiques. Et ici, il pourrait s'appliquer au bégaiement.
Anonyme a dit…
Bonjour,

J'aimerai bien avoir la certitude que mon bégaiement est une conséquence des hémorragies méningées que j'ai eu à la naissance et si thérapie il y a par un orthophoniste ou si cela peut être amélioré par des séances chez un psychologue. Merci à ceux qui auraient pu être dans mon cas de m'apporter leur témoignage.